Sipo-SD de Marseille

Publié le par Tourisme Marseille

Sipo-SD de Marseille

Les services de la SIPO-SD, appelés le plus souvent « Gestapo », s’installent à Marseille dès l’occupation de la zone sud. Ils aménagent leurs locaux dans une villa au 425 rue Paradis.

villa au 425 rue Paradis

villa au 425 rue Paradis

La SIPO-SD compte six sections. Certaines ont un rôle plutôt administratif, d’autres s’occupent du recrutement. La section IV prend en charge les arrestations, les interrogatoires et la sécurité militaire. Elle est, elle-même, divisée en plusieurs sous-sections. La sous-section IV E, avec Ernst Dunker-Delage, est spécialisée dans la répression de la Résistance et la section IV J pourchasse les Juifs. De nombreux témoignages de résistants font état de tortures pratiquées dans ces locaux également aménagés en cellules. Des Français, membres du Parti populaire français (PPF), sont stipendiés par la Gestapo et participent très activement à la répression de la Résistance et à la chasse aux Juifs et aux réfractaires au Service travail obligatoire (STO). Le service de Dunker comprend plus de soixante-dix agents permanents dont neuf Français identifiés.

Sipo-SD de Marseille

Ernst Dunker

Après ses études secondaires, Ernst Dunker travaille à partir de 1932, à 20 ans, dans l’hôtellerie internationale, à Saint-Raphaël puis La Baule, Rome, Milan, Londres. Au début de 1939, il est restaurateur à Hoboken (États-Unis). Il parle couramment trois langues étrangères, le français, l’anglais et l’italien. Rentré à Berlin, il est mobilisé le 20 décembre 1939 au 99e régiment d’infanterie motorisée et fait la campagne de France.

Ernest-Dunker-dit-DelageI est ensuite affecté à Paris à la police de sécurité allemande rue des Saussaies. En mars 1943, à 31 ans, il est envoyé, avec le grade de SS-Obersturmführer (sergent-chef), au SIPO-SD de Marseille, sous les ordres du lieutenant Kompe, chef de la section IV E (contre-espionnage), qui s’occupe aussi de la lutte contre la Résistance française, le SIPO-SD étant commandé par le SS-Stumbannführer (commandant) Rolf Mühler. Ernst Dunker a agi à un grade subalterne mais son activité a été si importante, adroite, efficace et terrible qu’il est devenu à lui-seul la légende noire du SIPO-SD de Marseille.

Ivan Beltrami, externe entré au service des consignés de l’hôpital Salvator de Marseille pour pouvoir y soigner son frère Francis, indique que ce dernier avait six fractures au bras, onze aux côtes, un tympan crevé, des blessures sur tout le dos après avoir été sauvagement torturé rue Paradis par Dunker, qualifié de fou sanguinaire, et deux Français de son équipe, le boxeur Tortoni (abattu plus tard par la Résistance) et Daveau (condamné à mort à Marseille puis gracié). Au débarquement de Provence, Dunker quitte Marseille pour se replier en Allemagne. Rentré en France l’année suivante après être passé par la Suisse, il est arrêté avec sa maîtresse à Paris le 25 mai 1945 et transféré à Marseille.

L’activité d’Ernst Dunker contre les mouvements de Résistance a été considérable et particulièrement dévastatrice. Elle est connue principalement par trois rapports établis par lui, retrouvés à Marseille en septembre 1944. Détenu à la prison Chave de Marseille, Ernst Dunker est renvoyé devant le tribunal militaire de Marseille. L’instruction, menée principalement par le colonel Pétré, torturé rue Paradis, et à laquelle Dunker apporte son concours, ne fait l’objet d’aucune contestation. Me Garsi, du barreau de Marseille, commis d’office, défend l’accusé avec opiniâtreté pendant les trois jours du procès ; sa plaidoirie dure une heure trois quarts et il est félicité en audience pour son travail par le tribunal après le prononcé de la sentence. 

Dunker reconnait sans difficulté la plupart des faits et se défend en déclarant qu’il n’a agi que sur ordres, en soldat et à un rang très subalterne, se retranchant derrière ses chefs « à qui il ne pouvait qu’obéir en tout et pour tout ». Dans sa dernière déclaration avant le délibéré, il dit : « Nous n’avons pas tous le bonheur d’être Français et, malheureusement, je suis Allemand ».     Le tribunal militaire le déclare criminel de guerre le 21 janvier 1947 et le condamne à la peine de mort. Pour des raisons qui restent à expliciter, Ernst Dunker ne sera exécuté que trois ans plus tard, à Marseille le 6 juin 1950

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